Le burn-out chez les médecins : état des lieux

De nombreux professionnels de santé sont ou seront un jour concernés par le burn-out, un phénomène qui n’épargne pas les ophtalmologues. Pression exacerbée, charge de travail excessive, manque de temps, sentiment d’inefficacité… le quotidien des médecins n’est pas toujours au beau fixe. L’accent doit avant tout être mis sur la prévention, et ce, dès les études de médecine, qui constituent une période à risque pour les jeunes médecins en devenir. Quoi qu’il en soit, le sujet du burn-out est suffisamment important pour avoir fait l’objet d’une session plénière au congrès de neurologie nord-américain annuel.

État des lieux sur le burn-out en médecine

Exercer la médecine peut être professionnellement très gratifiant : échanges humains, diagnostic dans des situations complexes avec mise en place de traitements personnalisés, suivi de patients en lutte contre leur maladie ou pour leur survie et avancées en recherche importantes, avec une traduction souvent directe dans la pratique clinique.
Mais certaines spécialités sont plus exposées que d’autres et le syndrome d’épuisement professionnel a été décrit initialement chez les oncologues, les anesthésistes et les étudiants en médecine. Oncologie et anesthésie sont des spécialités où les médecins seraient plus souvent confrontés à des décisions engageant la vie et la mort de leur patient, à des choix thérapeutiques utilisant des molécules toxiques à fenêtre thérapeutique étroite et pour lesquelles existe un équilibre précaire entre les bénéfices/risques des soins donnés pour un gain de survie souvent limité (1-3).
Parallèlement aux questions existentielles quotidiennes, les médecins doivent maintenir leur niveau de connaissances et assimiler toutes les nouvelles avancées scientifiques et thérapeutiques à un rythme très soutenu. Ceci est maintenant vrai pour la plupart des spécialités.
Ce n’est qu’en 2014 que paraissent les premières études chez les neurologues (4-6). Elles démontrent que cette spécialité émarge en troisième position du risque de burn-out, dans une profession pour laquelle plus de la moitié des praticiens rapportent au moins un symptôme de burn-out.
En exercice hospitalier ou libéral, il existe actuellement une augmentation des charges administratives avec une course au rendement, une perte progressive d’autonomie et une réglementation de plus en plus importante auxquelles doit faire face tout médecin. Cette surcharge administrative peut également être responsable d’une souffrance personnelle et se manifester de diverses manières, dont la dépression, l’anxiété, la souffrance psychologique et la fatigue.
Le burn-out est un syndrome caractérisé par la perte de l’enthousiasme pour le travail ou par un épuisement émotionnel, la dépersonnalisation (sentiment de cynisme) et le manque d’accomplissement personnel (perte du sens du travail effectué). Il est une des formes de souffrance fréquentes chez les médecins (7, 8).
Des études menées parmi les médecins spécialistes dans plusieurs pays montrent que près d’un médecin sur trois fera l’expérience du burn-out à un moment donné de sa vie professionnelle.
Les études auprès des oncologues retrouvent une prévalence de 25 à 35 % pour les oncologues médicaux, de 38 % pour les radiothérapeutes et de 28 à 36 % pour les chirurgiens (9-19). Bien que beaucoup estiment que le risque de burn-out est plus important chez les oncologues, peu d’études ont vraiment évalué ce risque comparativement aux autres spécialités médicales.
En France, les publications sur le burn-out sont assez rares et les médecins restent une catégorie de soignants peu étudiée comparativement à ce qui existe dans la littérature internationale. En 2001, Lert et Chastang publient une des premières études sur les médecins de centres de lutte contre le cancer et leurs résultats sont en adéquation avec les données internationales (18). L’Institut national du cancer (INCa) a également fait un appel à proposition en 2005 s’intitulant : « Mesure et évaluation du “burn-out” des équipes en services d’oncologie ». Un rapport final a été dressé sous la responsabilité de Didier Truchot, qui reprend les différentes caractéristiques du burn-out et donne les résultats d’une étude qualitative effectuée auprès de plusieurs centres, dont l‘activité est exclusivement consacrée à l’oncologie (19). Des entretiens ont été menés auprès de différentes catégories de soignants, dont des médecins. Il ressort de cet état des lieux que les facteurs de stress liés à l’organisation du travail et le temps sont les principaux facteurs d’augmentation du sentiment d’épuisement émotionnel. La charge de travail a l’impact le plus élevé sur le burn-out et elle est fortement liée à l’épuisement émotionnel et à la dépersonnalisation. Il n’y a pas eu d’enquête équivalente dans les autres spécialités médicales ou chirurgicales.
Pour un grand nombre de médecins, les premiers signes de dépression ou de burn-out apparaissent pendant leur cursus étudiant. En l’absence de tout état de fragilité antérieur, le risque de burn-out et de dépression apparaît chez les étudiants en médecine rapidement après leur inscription. Des études américaines montrent que plus de 50 % souffrent de burn-out et 25 % de dépression. Beaucoup attestent une anxiété chronique et une faible qualité de vie psychologique. Cette souffrance persiste après leur spécialisation et ne diffère pas selon la spécialité choisie.
En France, une étude en 2011 a évalué la fréquence du burn-out chez les internes en cancérologie (avec représentation des trois sous-disciplines : radiothérapie, hématologie et cancérologie) et identifié leurs sources de stress (Tab. 1) (20).

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